Sébastien Lecornu à Matignon : un Premier ministre face au défi du logement
Le lundi 15 septembre 2025
Immobilier et économie
La nomination de Sébastien Lecornu à la tête du gouvernement, le 9 septembre 2025, au lendemain de la démission de François Bayrou, propulse l’élu normand au cœur d’un des plus grands casse-tête sociaux et politiques du quinquennat : la crise du logement. Sans être spécialiste du sujet, le nouveau Premier ministre hérite d’un secteur à bout de souffle, où se mêlent pénurie de logements, ralentissement de la construction neuve, crise énergétique et tensions sociales grandissantes.
Sébastien Lecornu
Un pays en panne de logement
Le constat est implacable. Jamais la demande n’a été aussi forte. Selon la Fondation pour le Logement des Défavorisés : 350 000 personnes sont sans abri, près de 3 millions de ménages en attente d’un logement social, des loyers qui s’envolent dans les métropoles et une accession à la propriété bridée par des prix toujours élevés malgré la détente récente du crédit. Dans le même temps, la construction neuve s’effondre, les rénovations énergétiques marquent le pas et les collectivités alertent sur l’explosion des besoins d’hébergement d’urgence.
Ce panorama, dressé par les acteurs du secteur, place le logement au rang des priorités.
La contrainte budgétaire en ligne de mire
Cette crise survient alors que le gouvernement prépare la loi de finances 2026. Le texte, pensé par François Bayrou, tablait sur 43,8 milliards d’euros d’économies, dont plus de 5 milliards demandés aux collectivités locales. Une ligne rouge pour les élus, qui avait précipité la chute de l’ancien Premier ministre.
Or, le logement n’est pas seulement un coût : il représente un contributeur net de 53 milliards d’euros pour les finances publiques, via impôts et taxes. La marge de manœuvre est étroite : comment réduire la dette publique, plus de 3 300 milliards d’euros, tout en investissant dans la production et la rénovation des logements ?
Les arbitrages qui s’annoncent seront scrutés à la loupe : avenir de MaPrimeRénov’, création d’un statut du bailleur privé, financement du logement social et du Fnap, poursuite du programme « logement d’abord ».
Une nomination qui ouvre des incertitudes
Sébastien Lecornu n’arrive pas en terrain vierge. À Vernon, où il a été maire entre 2015 et 2016, Sébastien Lecornu avait soutenu un programme de rénovation urbaine et engagé la commune dans le plan Action Cœur de Ville. Il fut égalemenr Président de l'EPF Normandie, mais n'a jamais occupé de portefeuille dédié au logement.
Dès lors, son premier geste sera décisif : le choix du ministre du Logement. La reconduction de Valérie Létard est largement évoquée, tant elle bénéficie d’une légitimité acquise auprès des professionnels du secteur.
Un test politique majeur
Dans une Assemblée nationale fragmentée, où les compromis sont devenus la règle, chaque arbitrage sur le logement risque de se transformer en bras de fer. Les débats sur le zéro artificialisation nette (ZAN), la simplification du droit de l’urbanisme ou encore les normes énergétiques de la RE2020 ont déjà montré à quel point le sujet pouvait cristalliser les oppositions.
Pour Sébastien Lecornu, le logement pourrait bien devenir le révélateur de sa capacité à gouverner : concilier rigueur budgétaire et ambition sociale, réconcilier des acteurs aux intérêts divergents et donner une direction à un secteur en panne de vision.
Les attentes autour d’un statut du bailleur privé
Parmi les revendications récurrentes, la création d’un statut du bailleur privé occupe une place centrale. Les professionnels du secteur estiment qu’un tel dispositif permettrait de sécuriser et de stabiliser l’investissement locatif, aujourd’hui fragilisé par les incertitudes fiscales et réglementaires. Un statut clair, assorti d’avantages fiscaux ciblés, offrirait aux petits propriétaires une visibilité à long terme et pourrait relancer l’offre locative dans les zones tendues.
Les organisations représentatives, qu’il s’agisse de fédérations de propriétaires ou de réseaux d’agents immobiliers, rappellent que près d’un logement sur quatre en France est détenu par des bailleurs privés, et que leur découragement alimente directement la pénurie. Pour elles, l’absence de cadre pérenne fragilise le parc et freine les rénovations, faute d’incitations stables.